Journée d’émotion hier. Comme j’avais promis à ma nièce, avant tout ce drame, de monter à Bosco Gurin pour rendre visite au plus jeune habitant et à ses parents, nous avons tenté l’expédition. En voiture jusqu’à Riveo, nous suivons les indications des hommes de la protection civile et stationnons dans le vaste parking. Une camionnette nous emmène jusqu’au pont détruit.
Même si j’ai déjà vu de nombreuses photos ou vidéos, quand je me trouve devant la réalité de ce désastre, j’en reste sans voix. Quelle chance dans ce malheur que le pont de la piste cyclable (sur lequel passait autrefois le petit train du Val Maggia) ait résisté. Ils sont en train d’y terminer les travaux de renforcement qui permettront de laisser passer aussi les voitures légères et de rétablir un trafic provisoire pour acheminer l’aide la plus urgente. Pour l’instant nous le traversons à pied.
Arrivée de l’autre côté, la première personne que je vois est la propriétaire du charmant petit rustico du Val Bavona où j’aime me ressourcer. C’est en la voyant que je prends conscience que je suis désormais dans le monde du haut et une forte émotion m’envahit avec la même intensité que la rivière est montée, incontrôlable. De ce côté du pont je réalise combien cette vallée est chère à mon cœur et le sentiment de deuil qui règne tout autour de moi.
C’est à la fin des années 80 que j’ai découvert le Val Maggia lors d’un voyage d’études alors que j’étais agente de voyages à Echallens. Les autocaristes romands avaient été invités par l’office du tourisme de la vallée. Nous n’avions pas été très chanceux avec la météo, je crois qu’il avait plu pendant tout notre séjour. Cependant, j’avais tellement aimé que j’avais pensé qu’il devait y avoir quelque chose de particulier dans cette vallée pour autant l’adorer même sous la pluie. Je me souviens des cascades impressionnantes, de ces jolies maisons de pierre qu’on appelle les « rustico », mais il y avait aussi autre chose de difficile à décrire de l’ordre du mystique, une énergie belle et tragique à la fois. Depuis, j’ai eu l’occasion de bien la connaître et de comparer le val Maggia à un long bras qui se divise ensuite depuis Cevio en une main avec les doigts qui sont le val Rovana (qui se redivise plus haut en deux vers Campo et Bosco Gurin), le val Bavona et le val Lavizzara (qui lui aussi se sépare plus haut vers Peccia ou Fusio).
Vous pouvez donc imaginer combien je suis heureuse de retrouver l’adorable petit Natael au fond du val Rovana (heureusement épargné par la furie des eaux) et de partager quelques heures tous ensembles. Quand nous devons reprendre le bus pour redescendre à Cevio, je lui promets de revenir la semaine prochaine et de m’installer près de lui pour laisser ses parents participer au monstrueux travail de déblayage.
Quand j’y repense ce matin, c’est bien ce qui m’a le plus impressionnée, cet incroyable esprit de solidarité qui règne dans tout le haut de la vallée, l’action de chacun et la mise en place naturelle de tout ce qui va servir à la reconstruction. Bravo et courage à tous !




