Balade dominicale sur les bords du lac de Sihl, chez moi désormais… Le banc m’appelle, pas de rosée sur le bois, je m’y installe. La plume me chatouille, j’écris quelques mots. À droite, le son des cloches dans le pâturage complète la rondeur du paysage. À gauche, le clapotis des vagues adoucit le cadre de cette carte postale. Des promeneurs profitent de cette quiétude matinale et admirent comme moi l’arrière-plan des sommets enneigés. Eh oui, l’été s’en est allé. Encore cinq jours sur le calendrier, mais le ciel lui s’en balance de nos catalogages, ainsi semblent croasser les corbeaux tout là-haut, se moquant de ceux qui se croient les maîtres du monde. Hier on annonçait, comme si c’était une victoire, les premiers touristes dans l’espace… Encore une fois, on préfère aller souiller l’ailleurs plutôt que de balayer devant sa porte. Alors que les plaies du colonialisme ne sont pas refermées, comment ne pas s’inquiéter que des milliardaires puissent tout à coup avoir le pouvoir de s’acheter des étoiles ? Bien que l’on reste impuissant pour stopper le réchauffement, on se croit intelligent et puissant d’aller polluer au-delà de notre terre en lâchant dans l’espace des déchets qui ne se détruiront jamais.
Allez, revenons sur terre, admirons ces brins d’herbe bousculés par le vent, écoutons Éole s’engouffrer dans les arbres derrière moi. Un voilier gonfle sa toile sur le lac et glisse en silence. Les cloches du monastère n’en finissent plus de sonner. Un dernier regard vers ces deux belles vaches brunes… et dire que ce sont elles que l’on accuse d’être la cause de bien des malheurs… C’est comme si on ne connaissait plus la direction du bon sens. Une pie dans l’herbe verte me rappelle mon tableau préféré de Monet.

