J’aime avoir des habitudes quand je suis quelque part. On pense mieux pendant la routine quotidienne, on voit mieux aussi, même si on est à des milliers de kilomètres de son lieu d’origine. Il n’y a que l’horaire qui varie, le paysage est le même, les figurants ? Vu mon grand handicap qui fait que je ne reconnais pas les gens mais leurs histoires, je ne saurais vous dire si ce sont les mêmes personnages.
Je descends les 7 étages de mon immeuble et me faufile dans la foule, observant chaque mouvement :
Il y a un premier lac proche de chez moi avec ses pêcheurs, ces dames qui se tapent sur les pieds ou sur les jambes assises sur un banc.
Il y a cette petite boutique où chaque matin on confectionne des couronnes de fleurs aux teintes éclatantes. Au début je croyais que c’était des couronnes mortuaires, mais j’ai compris lors de la fête du 1er août organisée par l’ambassade suisse que c’était aussi des ornements pour les célébrations.
Il y a tous ces gens, attablés sur leur petit tabouret en plastique, qui mangent des soupes de nouilles sur les trottoirs. Souvent c’est tellement encombré que je préfère marcher sur le bord de la route.
Il y a de nombreux policiers dans leur uniforme kaki qui surveillent je ne sais quoi devant des petites cabanes en bois.
Il y a tous ces feux de la circulation qui des matins semblent parfaitement en harmonie avec la cadence de mon pas et d’autres matins ils me contrarient en étant obstinément rouges dès que j’arrive.
Il y a chaque matin ce même plaisir quand j’arrive sur les rives du lac Hoam Kiem et que je me lance dans le circuit… toujours dans le sens des aiguilles d’une montre pour me rappeler au bon souvenir de la marche autour du stupa.
Il y a tous ces groupes (surtout des femmes) qui font leur gymnastique quotidienne au rythme de quelque haut-parleur. Chacun a un emplacement spécifique, comme si c’était leur salle de sport. Mon préféré est celui sous le grand arbre car ils me surprennent toujours. Selon les horaires, ils dansent la valse, le tango, la salsa ou des chorégraphies plus locales, plus proches du Thai Chi vietnamien.
Il y a ce petit monsieur un peu âgé qui se promène avec une grosse médaille d’or autour du cou. Une fois il s’est assis à côté de moi sur un banc et il a essayé de communiquer. Comme son anglais n’était guère meilleur que mon vietnamien, je n’ai pas pu savoir dans quelle discipline il avait gagné sa médaille. C’était pendant les jeux asiatiques, je croyais qu’il en faisait partie, mais vu que les jeux sont finis depuis longtemps, il doit y avoir une autre explication puisqu’il est toujours là…
Il y a tous ces photographes avec des super objectifs qui attendent de photographier quelques sujets. Il est vrai que le cadre paisible du lac attire les foules et cela semble un rite de revêtir ses plus beaux habits pour immortaliser un instant de bonheur.
Il y a ces vendeurs d’éventails qui repèrent la sueur sur mon visage et qui m’éventent au passage, persuadés qu’ils vont faire une bonne affaire.
Il y a ce monsieur qui m’a fait croire au début qu’il y avait des oiseaux magnifiques à observer sous les arbres, jusqu’à ce que je comprenne que c’était avec son sifflet qu’il reproduisait ces chants mélodieux.
Il y a souvent des jeunes gens qui me demandent si je peux répondre à quelques questions. C’est un bon moyen pour eux de pratiquer l’anglais qu’ils étudient, ils arrêtent des Occidentaux autour du lac. L’autre jour ce sont deux fillettes d’une dizaine d’années qui m’ont épatée. Elles se débrouillaient tellement bien en anglais que je leur ai demandé si elles étaient dans une école anglophone. Non, m’ont-elles répondu, elles apprennent sur internet. L’une d’elle a même dit, un peu étonnée, qu’elle apprenait mieux toute seule sur internet qu’à l’école. Attention chers professeurs ! Il y a peut-être à creuser du côté de cette réflexion, ai-je pensé.
Il y a ces conducteurs de rickshaw qui m’interpellent au passage, espérant qu’enfin je me fatiguerai de mes longues marches et aurai envie de me reposer dans leur carriole pour qu’ils puissent gagner quelques sous en pédalant.
Il y a toutes sortes de vendeurs qui proposent chacun leur spécialité. Il y a cette femme en particulier qui m’interpelle chaque matin pour tenter de me vendre de l’eau, des cigarettes, un parapluie (quand il pleut) ou autres.
Il y a toutes ces jardinières au chapeau conique, accroupies dans les plates-bandes qui repiquent, désherbent, arrosent et renouvellent sans cesse les plantations… offrant au regard de beaux tableaux végétaux sous les grands arbres généreux en ombre.
Mais il y a aussi chaque matin quelque chose qui me surprend. Ce matin, c’était ce grand Américain noir sur le chemin du retour. Il avait un immense sac à dos avec les drapeaux de tous les pays. Au fait, je ne sais pas pourquoi je dis qu’il était Américain… Je ne lui ai pas parlé. Quand il a passé à côté d’un de ces policiers (ou soldat) en uniforme kaki, il s’est arrêté pour lui serrer la main. Dans ma tête j’ai construit toute une histoire… c’était peut-être un Américain qui a quelqu’un de sa famille qui a participé à la terrible guerre d’Indochine.
Et oui, je suis bavarde ce matin, me voilà presque libérée de toutes mes obligations professionnelles pour quelques semaines…

Grazie Anne-Lise per i quadri che hai dipinto con le tue parole, mentre ti leggevo nella mia testa si formavano le immagini: una bella mostra!
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Quindi mi fa piacere di averti portata con me in questo piccolo viaggio.
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