Même si cela me faisait un peu peur, je suis allée visiter la prison de Phu Hai, la plus ancienne et la plus grande des onze prisons sur l’île de Con Son. Elle a été construite par les Français en 1862.
À l’entrée, il y avait un panneau avec une flèche pour indiquer où prendre le ticket. Je n’ai trouvé personne au lieu indiqué, alors je suis entrée dans l’immense cour de la prison. C’était macabre, parce que mon imagination est trop florissante, elle me faisait voir le film de ce qu’avaient été ces lieux.
Les bâtiments s’étalent sur plus de douze mille mètres carrés. J’ai jeté un œil dans les dix grandes cellules, sursautant à chaque fois que mon regard y trouvait des mannequins enchaînés tant ils semblaient plus vrais que nature. Dans certaines on enfermait jusqu’à deux cent personnes. Des milliers de personnes étaient détenues en ces sinistres lieux, les prisonniers politiques et de droit commun y étaient mélangés. À l’époque des Français, tous les prisonniers étaient nus, enchaînés les uns aux autres, une petite boîte servait de toilettes à des centaines de personnes. Leur seule nourriture se composait d’une petite boulette de riz. Les pires tortures y étaient pratiquées, on voulait faire taire l’ennemi.
Heureusement, le temps efface les odeurs, mais c’était tout de même oppressant comme sensation. Si j’avais la peur au ventre, c’est aussi parce que j’étais complètement seule, je n’y ai croisé aucun autre visiteur, ni garde susceptible de me demander le billet que je n’avais pas pu acheter. Je craignais alors de me trouver devant une porte close quand je voudrais sortir.
Tout au fond de la prison, il y avait une vingtaine de salles d’isolement destinées aux prisonniers particulièrement dangereux. Les cellules ne devaient faire guère plus de deux mètres sur trois, pourtant on réussissait à y enfermer jusqu’à soixante-trois détenus. Ils y étaient tellement serrés qu’ils n’avaient même pas la place pour s’allonger.
Heureusement, j’ai retrouvé ma liberté et la belle plage de sable blanc m’attendait pour y noyer l’incompréhension de toute cette barbarie infligée à un peuple qui ne demandait qu’à être libre.
Quel gâchis ! Pourquoi ce pays a-t-il été la scène d’autant de violence ? Le pire c’est que l’histoire oublie vite les actes inhumains et leurs conséquences.


