Demain, dès l’aube, à l’heure où Katmandou s’anime,
Je partirai. J’irai plus loin vers les montagnes.
Je vais m’éloigner de cette vision citadine,
Et me recharger des couleurs de la campagne.

Demain, dès l’aube, à l’heure où Katmandou s’anime,
Je partirai. J’irai plus loin vers les montagnes.
Je vais m’éloigner de cette vision citadine,
Et me recharger des couleurs de la campagne.

Nous parlons d’embouteillage, mais dans certains cas je trouve que ce serait mieux d’utiliser l’expression anglaise Traffic jam, car c’est bien à de la confiture que ressemble la situation. Ça colle de tous les côtés, sans pour autant avoir un goût très sucré, emmêlant au carrefour bipèdes, deux roues, quatre roues et quadrupèdes entre les étalages des marchands, avec les odeurs de volaille en cage ou de boucherie…

Et quand tout à coup le rideau de nuages s’ouvre, je n’hésite pas à m’asseoir un instant du côté de Durbar Square (mon endroit préféré près de là où j’habite), où touristes et locaux se côtoient dans la tranquillité. Ces jours le trafic est encore plus intense. Imaginez un peu la folie des dernières courses avant Noël… ça y ressemble un peu côté agitation, mais sans le « Jingle Bells » bien sûr… la fête de Dashain
(…)
J’aurais sûrement l’occasion de vous en reparler…

Je voudrais vous montrer de belles et hautes montagnes, pourtant c’est à se demander si le toit du monde n’aurait pas une fuite, tant nous sommes arrosés du côté du Népal. Je devrais peut-être en profiter pour écrire une nouvelle version de Singing in the rain.

Mon apprentissage n’a d’autre fruit que de me faire sentir combien il me reste à apprendre.
Michel de Montaigne
Au départ je me suis inscrite à cette sympathique « course d’école parce que je voulais apprendre à prendre le bus. Vous pouvez rigoler, mais c’est probablement parce que vous ne savez pas ce que c’est de n’y rien comprendre entre les gros bus, les mini-bus et les tuk-tuk électriques qui se déplacent dans la jungle urbaine et d’où des crieurs sortent à chaque arrêt pour hurler la destination (que je ne comprends pas bien sûr). L’objectif de cette joyeuse excursion était Thamel, le centre touristique de Katmandou (qui je l’avoue je ne connaissais pas encore) pour aller y faire un cours de sculpture sur bois. La seule indication qu’on m’avait donnée c’était qu’il fallait être capable de rester assis en tailleur pendant quatre heures et s’habiller de manière confortable. Accueillis par les deux frères qui proposent ces cours le samedi, j’avoue que j’ai été impressionnée par leur capacité à faire découvrir leur art à des néophytes complets, avec une grande patience et de constants encouragements, malgré quelques maladresses. Dès aujourd’hui, je sais que mon regard sera différent sur cet art.
Si vous êtes de passage dans la région je vous encourage à aller découvrir ce qu’ils font.
Pratham Raj Bajracharya – SCULTOR WOOD CARVER

Hier ma fille m’a demandé si je faisais du sport au Népal. Sur le moment j’ai répondu que NON, mais depuis j’ai réfléchi. Je me suis dit qu’il y en a qui font du step… moi, j’habite au troisième étage, sans ascenseur et ai toujours sur le dos un poids qui me rappelle que j’ai de la chance d’avoir des genoux solides. Il y en a qui font du Nordic Walking… moi, je fais du Walking Népalais, et sans bâtons, sur des trottoirs (quand il y en a) où personne ne réussit à écrire des SMS en marchant. Il y en a qui rament… moi je rame pas mal pour m’organiser avec les transports. Il y en a qui font de la natation… moi, ces jours je patauge pas mal dans la gadoue… Et peut-être que c’est mieux de ne pas avoir encore de scooter, j’aurais en plus dû faire du motocross, surtout ces temps où la mousson n’en finit plus de nous arroser copieusement, comme si là-haut ils étaient en train de vidanger les robinets.

Impossible de réaliser deux défis en une journée, je me contenterai d’avoir enfin trouvé le bureau de poste pour envoyer mon premier courrier. Apparemment, la vente de timbres postes ne rapportent plus beaucoup par ici. Quatre personnes semblaient n’attendre que moi et les corbeilles de courrier ne s’entassaient pas sur le comptoir.

L’autre mission était celle de rentrer à la maison avec mon nouveau scooter, mais ce n’est pas parce que j’ai payé le papier magique que la tâche a été simplifiée, il fallait encore songer au problème du financement. Ici, on ne peut presque rien payer avec une carte de crédit. J’ai trouvé les petites cabines près des banques dans lesquels on s’isole pour retirer au distributeur, mais il faudrait faire de nombreux prélèvements pour réunir la somme sur quelques jours, avec à chaque fois une commission. Alors j’ai voulu essayer de retirer à la banque. Quand je suis arrivée, on servait le numéro 30, j’ai pris le billet 82 à l’automate et me suis installée parmi la foule pour regarder un programme d’aventure à la télévision… Une heure plus tard, quand j’ai dit au banquier que je voulais retirer avec ma carte de crédit, il a interrogé tous ses collègues pour savoir comment faire, puis a téléphoné, et m’a finalement tendu un petit papier sur lequel il avait écrit qu’à cause d’un problème technique, je ne pouvais pas prélever avec cette carte. Quand je lui ai demandé si cela pourrait fonctionner avec une autre carte, il a répondu Non, et demain ? Non.
Mon seul espoir est que l’auteur népalais Narayan Wagle ait raison :
À mon avis si tu choisis une voie artistique peu importe laquelle c’est mieux de vivre en Orient plutôt qu’en Occident. L’Occident est certes plus développé, mais ils n’ont pas ces innombrables petites histoires liées au tracas quotidiens de l’Orient, ils manquent de créativité. L’espace entre le problème et la solution laisse libre cours à l’imagination. Il règne dans ce désordre une magie propice à la créativité.
Le Palpara Café, Narayan Wagle
Un électricien pourrait-il m’expliquer comment les électriciens népalais font pour retrouver le bon fil ?

Le défi du matin : opération Tootle. Depuis que je suis ici, ma jeune voisine me dit que la solution à mon problème de transport c’est Tootle. C’est une application sur internet qui permet de réserver un trajet à moto et pour lequel le prix est fixé d’avance en fonction du nombre de kilomètres. Il me faut du temps pour arriver là où on veut m’emmener, mais je finis toujours par y arriver. Ne dit-on pas qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ? Moi, qui au début disait « Ça jamais ! », j’ai décidé d’essayer, car j’en ai marre de me faire escroquer par les chauffeurs de taxi (qui ne voient en moi qu’une occidentale pleine de roupies) ou d’attendre pendant des heures l’horaire de mes cours (quand je prends le bus scolaire).
Opération réussie ! Le motard est arrivé devant ma maison (même s’il n’y a ni nom de rue ni numéro sur les maisons) dix minutes après ma réservation… c’est génial tout de même la technologie. Le chauffeur était sympathique, curieux, bavard et bon conducteur. Il m’a surprise quand il a osé me demander mon âge… mais je lui ai confessé toutes les années au compteur (sans mentir). « Ouh là là ! » a-t-il répondu. Intriguée, j’ai essayé de comprendre ce qu’il y avait dans ce « Ouh là là », qui n’était pas du tout moqueur… Avec le bruit des moteurs voisins je n’ai pas compris ce qu’il a dit…

Vous l’avez sûrement déjà compris, il me faut des défis de temps en temps… Comme j’avais déjà testé le trajet de l’école à la maison à pied en deux heures, j’ai voulu essayer à bicyclette. Si l’oxygène ne m’avait pas manqué, j’aurais peut-être pu chanter À Katmandou à vélo, on dépasse les autos…
Aujourd’hui, n’ayant qu’une heure d’enseignement sur mon horaire, je me suis octroyée une grasse matinée, quoique la nervosité m’a plus fait tourner en rond dans mon petit studio que profiter de ces quelques heures supplémentaires. Pourquoi nerveuse ? C’est ainsi un défi, même si l’objectif n’est pas l’Himalaya, on n’est jamais sûr de réussir avant d’avoir essayer. Est-ce à cause de la pollution extrême qui règne dans la capitale népalaise que les sherpas montent si haut sans oxygène ?
Si j’ai survécu après une rencontre avec un petit veau au milieu du trafic, croisé un troupeau de vaches disséminé sur les 40 minutes du parcours, respiré l’air délicieux dans les nuages noirs derrière les gros bus, talonné les motos pour montrer que j’étais à la hauteur, je ne sais pas ce qu’en diraient mes poumons si j’osais répéter quotidiennement l’exercice… Dans tous les cas, je suis arrivée bien en avance, même assez tôt pour boire le thé au lait avec mes collègues et me rafraîchir sous le ventilateur en attendant mes élèves qui n’arrivaient pas… Aujourd’hui, on célébrait les professeurs (c’est vrai qu’ils sont les champions des célébrations ici), alors il y avait répétition pour la danse. Il y a des jours où je suis plus philosophe, alors j’ai attendu sagement et ai tout de même pu faire cours (presque quinze minutes) à des jeunes filles qui s’étaient mises sur leur 31 pour célébrer leurs professeurs. Comme c’était déjà l’heure du déjeuner, j’ai profité de reprendre un peu d’énergie à la cantine (il y avait des pâtes au menu) avant de repartir affronter la jungle urbaine.
