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La tolérance n’est-elle pas le meilleur remède ?

Cette semaine à l’école j’ai eu une de ces surprises auxquelles je commence à prendre goût. Quand je suis arrivée à l’école, la secrétaire m’a demandé si j’avais un foulard pour me couvrir la tête. Tout de suite, je comprends que j’ai encore manqué une information et que certains de mes cours n’auront pas lieu. En effet ce jour-là, à l’école, on célébrait le 550ème anniversaire de la naissance de Guru Nanak. J’avais déjà eu l’occasion de découvrir qu’il s’agissait d’un mystique et poète indien, maître fondateur du Sikhisme, car le mardi nous avions eu congé pour une grande célébration à Katmandou.

Alors voilà que le programme des cours va être à nouveau tout chamboulé. La cérémonie devrait commencer à 10 heures. Je vais faire comme d’habitude, suivre le mouvement, en espérant ne pas commettre d’impair. Quand je vois les élèves qui attendent en file devant la porte pour aller sur le terrain de sport, je constate qu’ils sont tous en chaussettes (blanches)… Est-ce que je dois moi aussi retirer mes chaussures ? Non, me répond-on, les élèves, ayant tous les mêmes chaussures, ils les ont laissées dans leur salle de classe pour éviter la confusion. Je devrais donc les enlever plus tard… Je suis les élèves et fais la queue derrière ceux qui, comme moi, n’ont pas de foulard, afin d’en recevoir un. Personne, ni enfant, ni femme, ni homme, ne peut avoir la tête découverte. Les hommes Sikh portent le turban. Une fois mon foulard orange noué par une experte, je vais m’installer en tailleur sur les tapis qu’on a déroulés sur le terrain de basket. Attention, les hommes sont à gauche, les femmes à droite. Des musiciens jouent une musique qui me plonge très vite dans une méditation agréable. Un immense papillon coloré vole sans crainte par dessus nos têtes, se posant de temps à autre sur l’un des foulards. Le prêtre ne parle pas longtemps, mais bien entendu je ne comprends pas un mot de ce qu’il dit, il parle en népalais, en hindi, ou que sais-je. Heureusement que je me suis entraînée à Namobudha à rester assise en tailleur longtemps, car la cérémonie dure jusqu’à midi.

Encore une fois je viens d’assister à une grande leçon de tolérance. Cette école est le contraire de la laïcité… Non pas parce qu’on y propage des idées religieuses spécifiques, mais plutôt parce qu’on semble y célébrer toutes les fêtes des diverses religions, afin d’ouvrir un horizon de tolérance dans l’esprit de chaque étudiant. Cela fait passablement réfléchir par rapport au débat houleux dont on entend les échos jusqu’ici depuis la France.

Gurun Nanak

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Sacrées vaches !

Bien que nous n’ayons jamais gardé les vaches ensemble, permettez-moi quelques réflexions après avoir pas mal ruminer pour tenter de mieux comprendre les vaches de cette grande ville. Pour l’instant aucune ne m’a fait de coup vache au milieu du trafic, elles sont pacifiques, comme la population. Non, dans ce pays je n’ai jamais rencontré de peau de vache ni entendu personne crier « Mort aux vaches ! » contre les représentants de l’ordre. Ici, je ne dirais pas que je suis dans une période de vaches maigres, sans pour autant vivre celle des vaches grasses, l’important c’est qu’on ne me prenne pas pour une vache à lait. Je ne peux malheureusement même pas vous dire que je parle le népalais comme une vache espagnole (puisque mon vocabulaire a moins de dix mots). La bonne nouvelle c’est que j’adore cette saison où il ne pleut plus comme vache qui pisse.

Ah la vache ! je ne m’étais jamais rendu compte combien les vaches se promenaient souvent dans la langue française ! Allez, on va arrêter avec toutes ces vacheries, même si c’était vachement sympa d’essayer de mieux connaître les vaches de Katmandou.

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J’aimerais comprendre

Les vaches regardent passer les trains parce qu’elles ne peuvent pas monter dedans.

Sylvain Tesson

Sérieusement, j’aimerais bien comprendre ce qui se passe dans la tête des vaches de Katmandou. Depuis que je suis enfant, j’ai grandi avec cette idée que les vaches aimaient regarder les trains passer dans la campagne et surtout dans les montagnes, où les trains circulent plus lentement. Dans le pays d’où je viens, elles sont au spectacle, tellement le pays est petit et jalonné de réseaux ferroviaires. Comme il n’y a pas de train au Népal, je me demande si c’est pour cela que les vaches d’ici semblent autant fascinées par le trafic urbain, à tel point qu’elles se couchent souvent au milieu de la circulation. L’animal est sacré dans ce pays. Il est interdit de les frapper ou même de les toucher. Tout manquement à cette règle peut être sévèrement puni. Il vaut mieux être vigilant sur la route (et ne pas rêver d’un bon filet de bœuf) car celui qui tue une vache est passible de deux ans de prison.

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Non ce n’était pas mieux avant

L’autre soir le thème de la leçon avec mon étudiante était « C’était mieux avant »… Bien sûr, cela a le mérite de nous faire pratiquer les temps du passé, mais comme les textes étaient teintés de beaucoup de nostalgie, cela m’a un peu agacé de devoir respirer l’air poussiéreux de cette brocante. J’avoue que je ne partage pas du tout cette tendance à croire que c’était mieux avant. On n’arrête pas le temps et c’est tant mieux de pouvoir vivre dans cette époque (qui sera peut-être la Belle Époque pour certains d’ici quelques décennies). Franchement je trouve cela génial en tant que mère qui a dû s’expatrier pour son travail de pouvoir boire mon café chez moi, prenant un bain de soleil sur une terrasse des toits de Katmandou, en regardant une vidéo de mon fils en train de mesurer les vingt-cinq centimètres de neige qui sont tombés à Bosco Gurin ces derniers jours, de partager la joie de ma fille en lisant la lettre qu’elle vient de recevoir, lui annonçant qu’elle a gagné un scooter (cousin de Scooty) à un concours, voir mon autre fille en escapade amoureuse, immortalisés tous les deux devant la fontaine de Trévi, et entendre la voix de ma sœur me donner les dernières nouvelles de la famille… et tout cela grâce au WIFI… gratuitement (enfin grâce au loyer payé). Merci Degachen II ! Non ce n’était pas mieux avant, c’était différent.

Fleur

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Le bonheur est dans le pré

Le bonheur est né de l’altruisme et le malheur de l’égoïsme.

Bouddha

Pourquoi est-ce que quand on m’interroge sur ma motivation à écrire cela semble bloquer le processus d’écriture ? Probablement que s’est lié au besoin de se sentir légitime dans cet art… Oui mes ateliers d’écriture me manquent, parce que j’aime découvrir (en écoutant les participants) la graine d’un texte et imaginer ce que cela pourrait devenir.

rhdr

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Le goût de la liberté

Depuis que je suis motorisée, je suis comme ce petit singe qui admire la ville de Katmandou (en haut à gauche sur la photo), je vois mieux, je comprends mieux, je vole grâce aux ailes de Scooty, et je n’ai plus peur de me perdre. Ce n’est pas de tout repos et la règle la plus importante est de ne jamais contempler le paysage pendant qu’on roule. Il faut beaucoup d’imagination pour anticiper n’importe quelle bêtise ou événement soudain qui pourrait survenir. Derrière mon casque il m’arrive de chanter au milieu du trafic parce que le goût de la liberté donne la banane… Hier c’était « Aux Champs Elysées » en remontant la Ring Road (le périphérique qui fait le tour de la ville), qui pourtant ne ressemble en rien à la célèbre avenue…

rhdr

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Mercredi 30 octobre : Bhai Tika

Mercredi 30 octobre : Bhai Tika – Le cinquième jour est celui de la Bhai Tika, la cérémonie que tout le monde attend avec impatience. Les sœurs ainées (Didi) apposent la tika (un mélange de yaourt et de couleurs spécifiques à ce festival) sur le front de leurs frères cadets (Bhai), en leurs offrant des bénédictions. Elles prient Yama pour la croissance, la prospérité et la longévité de leurs benjamins.

Toutes les maisons du pays sont illuminées et décorées avec des bougies, des lampes à huile et des guirlandes électriques. Le Stupa de Swayambunath offre une vue imprenable sur un Katmandou brillant de mille feux. Il est traditionnel d’aller de maison en maison chanter les bénédictions de Tihar, pour lesquelles les habitants de la maison offrent de l’argent. En dépit de l’interdiction gouvernementale des pétards et des feux d’artifice remplissent le ciel.

Là-haut sur la colline

On oublie les épines

Le chevreuil dans le pré

Illumine ma journée

Un oiseau sur la branche

Une joie en moi déclenche

Le vent caresse les feuilles

Je m’arrête sur le seuil

Pour un dernier regard

C’est l’instant du départ

Prenant dans mon bagage

Un conseil de grand sage

 

Never reply when you are angry.

Never make promise when you are happy.

Never make a decision when you are sad.

oznorTO

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Lundi 28 octobre Gai Tihar

Lundi 28 octobre Gai Tihar – Le troisième jour célèbre Gai Tihar et Laxmi Puja. Lors de cette journée, on dédie des prières et on offre de la nourriture à la vache (Gai), symbole de Laxmi. On prie également la déesse à laquelle on offre une Puja (offrande) sophistiquée le soir. Chacun trace devant sa maison un chemin avec des poudres de couleurs, pour que Laxmi trouve l’entrée du foyer. Les portes et les fenêtres restent ouvertes pour elle. Et pour mieux attirer son attention, on place des rangées de lampes le long des fenêtres et des portes.

Voilà trois mois aujourd’hui que j’ai atterri dans ce pays si différent du mien. Pour marquer ce passage, je me suis retirée quelques jours dans ce monastère bouddhiste. Je respire et me ressource dans cette nature qui me rappelle que je la vénère plus que n’importe quelle religion.

Alors que s’installe déjà une certaine routine monastique, rythmée par les repas et la prière de l’après-midi, je prends le temps pour une réflexion sur ce premier trimestre. Heureusement, aujourd’hui je n’ai plus ces crises de découragement qui, au début, me donnaient envie de quitter le pays. Mes expériences passées m’ont aidée à m’adapter à toutes les situations, cela va mieux aujourd’hui, surtout depuis que j’ai les ailes de Scooty. Je m’étonne cependant, alors que j’ai toujours eu comme priorité d’apprendre la langue du lieu où je résidais, de n’avoir pas réussi à apprendre plus de trois mots de népalais (et encore le Namaste je le savais déjà avant de partir). Il faut dire que c’est compliqué. J’enseigne le français dans une école indienne où la langue de communication devrait être l’anglais (un anglais que je ne comprends pas toujours tant l’accent de certains est prononcé), de plus je ne suis pas capable de reconnaître si mes collègues (ou les élèves) parlent le hindi ou le népalais entre eux. Dans ce monastère, les prières sont dites en tibétain, mais je ne sais pas dans quelle langue les moines communiquent entre eux. Dans le quartier où j’habite ils parlent le newari et je sais seulement dire bonjour avec un mot qui sonne comme Jojo Lapin. Je dirais que pour apprendre une langue le facteur le plus important est celui de la motivation, l’envie de communiquer. En observant la vie de ces moines, qui jamais ne cherchent à communiquer avec nous, je me rends compte que c’est aussi pour cela que je ne suis pas motivée à apprendre la langue. Dans ce pays, je rencontre très peu de gens curieux de l’autre, je me sens rarement accueillie quelque part, beaucoup observée, mais sans jamais savoir ce que pensent vraiment les gens. Même dans le petit supermarché où je fais mes courses, on ne nous dit ni bonjour ni au revoir. On ne peut leur en vouloir pour cette nonchalance, c’est ainsi partout. Même le merci n’est pas un mot que l’on prononce beaucoup. Par exemple, quand un élève a son anniversaire (il a le droit de venir à l’école sans être vêtu de l’uniforme) il apporte généralement un sac rempli de douceurs (bonbons, biscuits ou chocolats) qu’il distribue (même aux professeurs) et bien figurez-vous que j’ai beau tendre l’oreille je n’entends pas les merci. Les codes ne sont pas les mêmes, il faut du temps pour les apprendre et les comprendre.

Allez, la brume se lève, je vais bouger un peu…

rhdr